lundi 9 novembre 2009

Témoignage

AVIS : le message qui suit raconte un incident survenu aujourd’hui, qui n’a eu aucune conséquence, mais ça aurait pu être pire. Ainsi, ce billet peut inquiéter certaines personnes, en choquer d’autres et malgré tout ne rien vous apprendre de constructif. Lisez si vous voulez mais ne m’en tenez pas rigueur, vous aurez été avertis…
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J’ai hésité. J’en parle, ou pas? J’vais inquiéter ma mère, et dans une moindre mesure plein d’autres gens aussi… Mais là n’est pas mon intention. J’écris ceci pour relater un épisode de la vie d’un métallurgiste, pour en rendre compte, pour qu’on puisse le lire un jour et dire « ah, ok. C’est vrai alors… » Pour mes amis métallos surtout, pour tous les autres si ça vous intéresse ce qu’on peut faire avec presque rien un soupçon d’eau et un peu de métal… Parce que aujourd’hui on a bien malgré nous vérifié une chose qu’on apprend dans les cours de sécurité en fonderie. On a eu un « incident » (comme un accident, mais sans blessure…). On a « un peu » fait une explosion d’aluminium liquide. Pas de panique : nous étions protégés. Et à part une petite frayeur et du métal un peu partout, tout est ok. Je vous explique…

Vous le savez peut-être, l’eau liquide, quand elle passe en vapeur, augmente de volume. Et si le volume est gardé constant, alors la pression augmente… Principe du presto ou de la locomotive à vapeur… Le volume augmente de « environ » 650 fois. Pas mal. Consigne quand on travail en fonderie : pas d’eau, jamais, nulle part. Parce que si cette eau vient en contact avec le métal liquide (donc très très chaud), elle passera automatiquement en vapeur, augmentant de volume et projetant ce qu’il y a autour, en l’occurrence le métal fondu, comme une charge explosive… Dans une fonderie donc, ne cherchez pas de robinet. Interdit de boire un Coke dans un centre de coulée aussi… De la même manière, TOUT ce qui doit entrer en contact avec le métal fondu doit au préalable être chauffé pendant suffisamment longtemps à plus de 200 degrés pour s’assurer que toute l’humidité en est partie. C’est ce qu’on apprend partout, c’est ce qu’on fait tout le temps.

Mais cet après-midi, malgré l’utilisation de nos procédures habituelles pour préchauffer les tubes que nous remplissons de métal fondu, un d’eux était encore humide à l’intérieur. On y aspire l’alu à 700 degrés, comme d’hab. Sauf que d’habitude c’est nous qui devons aspirer le métal à l’aide de la pompe. Là, la pompe pousse d’elle-même pour sortir. Et pis POUF! En un instant, nous reculons, surpris… et l’instant d’après nous nous apercevons qu’il y a de l’alu un peu partout, sur le plancher, les tables, dans le four… et un peu sur nous… Dans un rayon de 3 mètres environ, le creuset s’est vidé sous la pression engendrée par l’expansion de la vapeur d’eau restante dans le tube et son contenu s’est répandu partout, en une joyeuse explosion à 650 degrés… La question qui vient ensuite, après le pouf et le recul, après avoir ouvert les yeux et compris ce qui se passe : « Es-tu OK? » « Oui, et toi? » « Oui ». Ok alors.

Nous portions tout l’équipement de sécurité requis, comme d’habitude, et nous étions bien protégés. Tablier en cuir, sarrau, jambières de cuir, casque avec visière complète, gants jusqu’au coude… On avait tout, et c’était nécessaire. Nous n’avons rien eu de plus qu’une petite frayeur et un gros dégat! Et pis des « spots » brûlés sur les sarraus et les tabliers, un gant « plaqué alu » complètement bousillé et bon pour la poubelle… ou bon pour être exposé au mur, à titre de « leçon » pour montrer ce qui peut arriver… La leçon : toujours porter ses équipements de sécurité. Quoi faire à l’avenir pour éviter que ça n’arrive : utiliser des procédures de préchauffage encore plus longues et prudentes pour éviter tout risque, risque qui était par ailleurs, selon nos nombreuses expériences préalables, nul!

Par chance, personne d’autre n’était présent dans la fonderie, nous étions deux, attentifs et protégés par nos vêtements de sécurité. L’ais-je déjà dit : portez vos EPI. C’était 300g d’aluminium liquide, moins d’une tasse. Vous seriez surpris de voir à quel point on peut étendre une si petite quantité… partout. J’estime qu’il y avait moins de 0.1 ml d’eau liquide dans le tube, à peine un soupçon d’humidité. Ce tube, je l’avais séché à l’air comprimé avant de le placer dans un four à 700 degrés pendant plus d’une heure et demi. J’imaginais pas qu’une goutte d’eau pouvait y subsister…

Je me relis et je me dis que je suis peut-être stupide d’écrire ça… ça ne vous apprend rien et ça vous inquiète. Désolé m’man. C’est pas l’intention. Ce blogue raconte des tranches de vie, de belles et des moins belles, des bonnes et des moins bonnes. Pas de censure.

J’ai perdu mon métal, répandu un peu partout. C’est la pire conséquence. Je recommence demain matin, tout simplement. Et ce sera sécuritaire, no worries!

P.S. Et pis si mes collègues de travail lisent ça ce soir, ne vous en faites pas… J’avais l’intention de vous en parler demain… Daniel Graham est déjà au courant.

2 commentaires:

  1. Merci pour les mises en garde littéraires! Merci surtout d'avoir respecté scrupuleusement toutes les règles de sécurité!!!! M'man et P'pa qui t'aiment!!!!

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  2. Waouh, t'as vécu une explosion d'aluminium, intense...Heureusement que tu vas bien. Et oui, c'est vrai que les normes sécuritaires c'est pas pour rien... Je l'ai aussi appris une fois en travaillant sous hotte pour qqch que j'avais déjà fait au moins 50 fois et la fois d'après, ça s'est pas passé comme convenu, du coup, j'étais bien content d'avoir une vitre de 2cm entre moi et de la soude caustique bouillante...

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